Catégorie : Sujets des cafés-philo

Sujets proposés et débattus lors des cafés-philo.

Café-philo du 16 janvier 2008 au Café des Arts à Poitiers

13 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. L’homme se caractérise-t-il par son amplitude ? [4]
  2. Les criminels ne sont-ils pas au fond si ignobles ? [2]
  3. Faut-il nécessairement comprendre ce que l’on apprend ? [4]/[5]
  4. Les fleurs font-elles du bruit en poussant ? [3]
  5. Les souvenirs sont-ils les mégots de l’existence ? [4]
  6. Où se trouve la différence ? [6]
  7. Comment change-t-on d’avis ? [7]/[6] sujet débattu
  8. Que faire avant la mort ? [5]

– Pour certain, le meilleur moyen de ne pas changer d’avis est de ne pas en avoir. Cette assertion, pour profonde qu’elle soit, biaise d’emblée les données du débat. En effet, elle détourne la question « comment change t-on d’avis » qui nous obligerait, au passage, à nous interroger sur la manière dont on se forge un avis, au profit d’une autre question : « doit-on (ou pas) avoir un avis ? ». Nouvelle question qui, elle-même, mérite le détour vers : « peut-on ne pas avoir d’avis ? » et « à quoi sert-il d’avoir un avis ? ».
– Il ne vient pas immédiatement à l’esprit de préciser ce qu’est un avis. Disons pour l’instant que c’est penser quelque chose sur quelque chose. Avoir un avis conduirait alors à une clôture intellectuelle qui empêcherait de continuer à penser la chose. La pensée permanente et dynamique ( !), s’interromprait au profit d’une pensée figée ; une sorte de fossilisation intellectuelle de notre regard sur l’objet en question ! On approche ici l’idée d’une certitude où les choses sont ce qu’elles sont et pour toujours. Notre avis devrait donc rendre compte de cette réalité objective de l’objet. Il y a quelque chose d’exact dans cette réflexion. En effet, les systèmes fermés, à forte homéostasie (équilibre interne) fonctionnent grâce (entre autre) à ces deux caractéristiques et meurent (entre autre) à causes de celles-là mêmes. Il existe donc pour certains objets, une réalité intrinsèque finie, objective et définitive, ce que l’on peut peut-être traduire philosophiquement par le noumène, chez KANT. On ne pourrait alors, pour être intellectuellement irréprochable, arrêter de penser la chose que lorsque l’on a atteint sa vérité. Mais comment saurions nous que nous en avons atteint la réalité « nouménale » ? La science répond parfois à cela, lorsqu’elle authentifie une réalité objective. Mais le propre de la science n’est il pas de nous inciter à aller au-delà de là où nous en sommes. Atteindre la « vérité » dans ce contexte là n’est donc pas inhibition de la pensée et rejet de la complexité. Cela répond davantage à une organisation de la démarche de réflexion. Car cette démarche nécessite des étapes intermédiaires, des tâtonnements, des vérifications, des avis successifs qui nous conduisent, dans le meilleur des cas, à la connaissance (une connaissance). Notre avis constitue alors le matériau sur lequel nous appuyons notre expérimentation pour nous forger un avis d’un autre niveau. En effet, la connaissance que nous avons des choses ne se donne pas à lire immédiatement.
– Mais tous les systèmes ne fonctionnent pas avec cette réalité immuable des systèmes fermés. Pour les systèmes dits ouverts (ou vivants), ils n’y a pas de réalité figée mais une adaptation permanente à leur environnement, gage de leur évolution et donc de leur survie. S’il est certes dommage d’avoir un avis qui, inhibant ( ?) notre réflexion sur la chose, n’en donnerait qu’une vision partielle, il est désespérément de rechercher sa vérité objective, alors que celle-ci n’existe pas puisqu’elle est en évolution permanente. L’individu est un système vivant et ouvert, s’il ne fait pas preuve d’une trop grande rigidité (homéostasie). Plus il est en interaction avec des systèmes similaires et plus les échanges (d’avis) seront nombreux. Ainsi, ses chances d’enrichir ses propres avis seront-elle plus importantes.
– Il ne faut donc pas confondre la réalité du monde et le regard que nous portons sur cette réalité. Un avis doit-il être conforme à la réalité (! !!) des choses. Il existe des réalités objectives que la réflexion nous permet d’approcher, vers lesquelles les avis peuvent tendre à l’unanimité. Il existe des réalités subjectives, appréciées à partir de critères personnels qui rendent compte de la diversité. Notre avis est conforme à notre perception de la réalité. Un avis ne dit pas la réalité objective de la chose, il éclaire sur notre rapport subjectif à cette chose et dit autant de la chose que de nous.
– Pourtant, nous voyons bien que dans certaines situations, notre occlusion au monde est manifeste, notamment lorsque nous avons un avis tranché. Les extrémismes sont des exemples éloquents de cet état. Cette situation pose une double question : qu’est-ce qui nous aide à nous forger un avis et quels en sont les enjeux ?
– Ce qui apparaît le plus évident, c’est que nous construisons nos avis à coup d’arguments (avisé. Qui a un jugement réfléchi et agit avec prudence et sagacité). C’est dans l’explication et la compréhension des situations que nous pourrons nous faire un point de vue. Mais complément ou substrat à cette réflexion, l’expérience nous apporte aussi les arguments nécessaires à l’élaboration de notre avis. On voit ici, sur quel terrain se situe le combat pour élaborer et changer d’avis. Arguments et contre arguments, expériences et contre expériences fournissent à la réflexion les moyens de se faire une raison.
– L’autre élément clé résulte de la dimension affective. On se trouve alors dans le monde sensible de la perception, de l’émotion, de la vie intérieure. On peut alors se trouver personnellement dans des appréciations antagonistes sur une question. On peut être raisonnablement contre la peine de mort et la revendiquer lorsque l’on est personnellement touché par un crime. Selon la nature de chacun, et aussi sa capacité à rester centré sur soi même ou à se décentrer, c’est la raison ou l’émotion qui l’emportera. Mais ces deux critères ne semblent pas suffisants pour trancher. La question des enjeux intervient également. A quoi sert d’avoir un avis ?
– Que cela soit sur le plan individuel ou sur le plan collectif, un avis sert à construire et c’est ce qui fait l’importance d’en avoir un. Se construire une identité sociale par exemple, au travers d’une appartenance à un groupe et donc échanger ses avis avec un groupe de pairs. Se construire en se forgeant des valeurs à partir d’une différenciation entre ce qui est éthiquement bon et ce qui est mauvais (avis : de l’ancien français. Ce m’est avis ; ce qui me semble bon). Se construire dans l’opposition de ses points de vue à ceux des autres, c’est-à-dire dans la construction d’un lien social. Se construire par une mise en acte de son avis, dans la réalité. Avoir un avis, c’est permettre à une société de faire consensus sur une question (referendum par exemple) et de légiférer ou de s’opposer (manifestation) et faire pression. Avoir un avis permet de donner du sens à sa vie, en fonction de ses intérêts affectif, économique, intellectuel, politique, … C’est pour cela que, d’avoir un avis sur la couleur de la tapisserie ou sur la peine de mort, relève de la même logique de construction de sens. Chacun mesure les enjeux de l’expression de son avis relativement à son intérêt. Ne doutons pas que certains ont plus d’intérêt à manifester leur point de vue sur la couleur de la tapisserie que sur la peine de mort. Cela ne signifie pas que les conséquences collectives soient les mêmes. Au-delà des arguments et des émotions, c’est peut-être l’enjeu que nous plaçons dans notre avis qui nous rendra plus ou moins inflexible au changement.
– On peut illustrer cette position dans le rapport entre avis et autorité. Il arrive, dans le cadre de relations hiérarchiques que l’on nous demande d’agir contrairement à notre point de vue. Nous pouvons nous exécuter, ce qui ne nous empêche pas de conserver notre opinion (ni de la changer d’ailleurs). Nous pouvons aussi refuser. C’est finalement l’évaluation de l’enjeu qui nous fait opter pour l’une ou l’autre des directions. La question n’est pas tant de savoir si ce que l’on nous demande est tellement opposé à notre point de vue, nos convictions, nos croyances et autres certitudes, mais de savoir si celles-ci sont si importantes pour nous que nous ne puissions y renoncer. Car n’oublions pas qu’elles sont le ferment de notre construction identitaire et sociale.

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Café-philo du 9 janvier 2008 au Café des Arts à Poitiers

17 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. Sommes-nous civilisé ? [7]
  2. Faut-il être en paix avec soi même avant d’être ne paix avec les autres ? [0]
  3. Que penser de notre proximité flagrante avec le cochon ? [7]
  4. Le consommateur et le citoyen sont ils la même personne ? [9]/ [4]
  5. Comment se construit l’avenir [6]
  6. Sait on ce que le passé nous réserve ? [9]/[12] sujet débattu

La question s’énonce comme une sorte de paradoxe. En effet, s’interroger sur ce qu’une chose nous réserve devrait s’adresser à une situation non encore vécue, autrement dit, à venir. De plus, la formulation, « ce que cela nous réserve », tend à nous mettre en garde de quelque chose !
Pour dépasser cet apparent paradoxe, il faut peut être accepter l’idée que nous ne connaissons pas totalement notre passé. Sans rentrer dans la différenciation entre histoire et passé, il y a des manipulations de l’histoire à dessein politico-économique, ou encore des dénis du passé à des fins psychologiques… il y a plus simplement ce que nous ignorons de notre passé parce que nos investigations ne se sont pas orientées dans cette direction (refoulement), que nos moyens, techniques par exemple, ne nous ont pas permis de découvrir telle ou telle situation. Il y a encore ce que nous connaissons mais ne comprenons pas. Il y a donc, sans être exhaustif, de multiples raisons qui font que nous méconnaissons tout ou partie de notre passé. C’est en cela que nous pouvons dire que notre passé est imprévisible et qu’une partie reste à découvrir. Mais faut-il s’en méfier ?

D’un point de vue collectif, l’Histoire semble se distinguer du passé lorsqu’elle, s’affranchit du vécu individuel. En effet, si une personne vit un événement, son sentiment premier sera personnel et sensible ; d’ailleurs, cet évènement n’est pas encore historique. Le passé ne devient l’Histoire que lorsque l’évènement marque la vie, d’une personne (c’est alors son Histoire personnelle), d’une société ou d’une nation durablement et qualitativement. Tout ce qui s’est écoulé de la vie fait partie du passé mais nous ne pouvons retenir de l’Histoire que ce qui va influencer le futur. Ce sont les évènements signifiants qui font l’Histoire.

D’un point de vue individuel, notre passé est un vécu, conscient, inconscient ou refoulé, qui influence notre parcours personnel. Il ne peut sans doute pas y avoir de neutralité de notre histoire sur notre itinéraire car le monde matériel et idéel dans lequel nous vivons constitue une expérience déterminante. Mais à partir de cette expérience, notre raison (notre conscience serait plus juste) peut en retour nous permettre d’influer sur notre avenir ; ne pas répéter les mêmes réponses dans les mêmes situations, c’est-à-dire apprendre, finalement. Il n’est cependant pas suffisant de connaître et de comprendre son histoire pour ne pas reconduire les mêmes actes passés.

Toute la dimension psychologique et notamment la sphère affective vient parasiter le pur raisonnement et nous amène à reproduire les mêmes erreurs, éventuellement. Il n’est d’ailleurs pas sur que se soit les mêmes erreurs qui soient en jeu, comme si nous étions inscrits dans un cercle vicieux. Il serait peut être plus pertinent de penser la reproduction dans un schéma ascensionnel où l’on re-produirait (c’est-à-dire produire à nouveau) des erreurs, non pas faute de compréhension du passé mais de l’avenir. Mais la connaissance de notre passé est elle toujours salutaire ? Pouvons nous toujours assumer la vérité, ou notre vérité n’est-elle pas suffisante à porter ? Est-ce l’occultation de la vérité qui est problématique ou sa révélation ?

Cette question pose un double problème. L’histoire est elle une lecture objective du passé ou une interprétation plus ou moins arbitraire ? Si l’on se place d’un point de vue universel, l’Histoire des sociétés, des nations, de l’humanité a-t-elle quelque chose à gagner à se tromper elle-même ? Mais les enjeux sont-ils si différents du point de vue individuel ? La recherche de l’objectivité semble simplement plus contrôlable à l’échelle collective qu’individuelle. Ce sont les caractéristiques de la science qui peuvent rapprocher Histoire et objectivité. _ L’introspection individuelle (même par le biais de la psychanalyse) paraît beaucoup plus arbitraire dans sa quête de vérité. Mais une fois encore, a-t-on besoin de la vérité pour vivre ou de sa propre vérité ?

Ce qui renvoie au deuxième volet du problème : la vérité objective répond elle à un besoin éthique ou a une nécessité pragmatique ? Vaut il mieux vivre dans le secret ou mourir dans la vérité ? De manière moins manichéenne, il semble difficile de considérer une société qui construirait son « contrat social » sur le mensonge (en tout cas la non vérité). Quant à sa propre existence, c’est peut être à l’aune de ses névroses que l’on mesure son besoin de vérité !

Il y a finalement moins de différences entre histoire personnelle et Histoire universelle qu’entre Histoire et passé. Il faut que du temps s’écoule pour construire l’Histoire, alors qu’en quelques millièmes de seconde notre passé s’écoule. Mais le passé existe-t-il vraiment ? Il semble que le passé n’est pas de réalité propre en dehors de ce que le temps lui offre comme qualité. Le passé se superpose au temps et n’existerait que dans lui. Selon ce critère, on peut également interroger la réalité du présent et de l’avenir. Celui-ci parce qu’il n’existe pas encore et qu’il est incertain ! Qui peut être sur que la seconde à venir advienne réellement ; quelque cataclysme ne va-t-il pas détruire la planète avant que j’aie fini ma phrase ?

Quant au présent si éphémère, nous l’attendons depuis si longtemps qu’il est déjà passé ! A bien y réfléchir, la seule certitude que nous puissions avoir n’est-elle pas celle du passé. On peut également ainsi avancer que le passé est le vecteur sur lequel s’est construit la vie (c’était alors le présent). S’il continue à exister, c’est par le retour présent que nous faisons vers lui, tant par le souvenir (la mémoire) que par l’agir (ce qui continue d’influencer notre histoire). Ainsi, on peut préférer à l’idée que le passé n’existe pas, l’idée que celui-ci a existé et continue d’exister. La preuve de son existence nous est fournie par la trace que nous laissons au monde (individuellement et universellement), c’est-à-dire le sens de notre vie. Nos histoires respectives se forgent à partir du chaos de notre passé.

Cette volonté de certitude du passé renvoie peut être à la nécessité quasi existentielle de laisser une trace. Ne faut il pas se pincer pour savoir si nous sommes dans la réel, vérifier la présence de nos fèces pour lutter contre le néant, produire une trace pour confirmer notre existence et affirmer notre identité ?!

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Café-philo du 2 janvier 2008 au Café des Arts à Poitiers

11 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. Zidane est-il parti sur un coup de tête ? [2]
  2. Y a-t-il des transactions où la monnaie d’échange n’est pas de la monnaie ? [5] sujet débattu
  3. Quelle est la place du jeu chez l’homme et dans la société ? [2]
  4. Qu’est-ce que l’illusion ? [4]
  5. Qu’est-ce que l’on attend pour être heureux ? [2]
  6. La science peut-elle tout expliquer ? [2]

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Café-philo des Trois-Cités du 21 décembre 2007 au CSC du Clos Gaultier à Poitiers

4 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. La colère est elle bonne conseillère ? [1]
  2. Faut-il abolir la propriété privé ? [2]
  3. Faut-il croire au Père Noël ? [2]
  4. Politiquement correct ! Langue de bois ? [3]
  5. A-t-on le droit de dire ce que l’on pense ? [4] sujet débattu

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Café-philo du 19 décembre 2007 au Café des Arts à Poitiers

26 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. Le roi est-il un sujet ? [2]
  2. Sommes-nous encore assujettis à la morale judéo-chrétienne ? [7]
  3. Avons-nous une morale ? [9]
  4. La fessée est-elle un bon moyen d’éducation ? [4]
  5. Tout ou rien ? [1]
  6. Qui croire ? [7]
  7. Pourquoi croire ? [6]
  8. Faut-il apprendre pour comprendre ou comprendre pour apprendre ? [3]
  9. La forme prime-t-elle sur le fond ? [13] sujet débattu

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Café-philo du 5 décembre 2007 au Café des Arts à Poitiers

18 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. Quelles sont les rapports entre, propriété, liberté et sauvegarde du climat ? [4/18]
  2. Faut-il renoncer pour être heureux ? [9/18] sujet débattu
  3. Quand commence la décadence [7/18]
  4. Et si tout cela n’était qu’une vaste histoire de cul ? [2/18]
  5. Construire et détruire sont-ils les caractéristique de l’homme ? [4/18]
  6. Définit-on l’identité par des ressemblances ou des différences ? [8/18]
  7. Qu’est-ce que l’intelligence ? [5/18]

– Cette réflexion est proposée lorsque, arrivée à une étape de sa vie et ayant résolu les nécessités matérielles, la personne aspire à la sérénité ; cette sérénité qui pourrait passer par un retrait (ici retrait plus que renoncement) vis-à-vis de la dimension matérielle de la vie. Il a déjà, dans cet énoncé, l’idée que la recherche d’un certain bonheur serait seconde. Le bonheur ne devient une quête qu’au prix de la maturité ( ?), de la satisfaction matérielle de ses besoins ( ?), d’une démarche intellectuelle ( ?), …
– Le retrait, c’est peut être de recentrer ses désirs. Qu’est-ce qu’être heureux ? Est-ce que « être heureux » c’est « ne pas être malheureux » ? Cette tentation de définir d’emblée une chose par son contraire semble nous conduire vers une impasse tautologique. On peut certes tenter de préciser une chose par une espèce de réciprocité inversée mais,
– d’une part : Encore faut il dire au moins ce qu’un des deux termes signifie, faute de quoi, nous restons dans une sorte de syncrétisme, de « siamoiserie » du raisonnement -D’autre part, on prive chaque mot et , plus grave, chaque réalité, de son identité propre, renonçant par la même à donner du sens au monde ; monde qui sera tout à la fois soi et son contraire ! Une idée ne doit elle pas d’abord chercher à dire ce qu’elle est, après quoi elle désigne son contraire.
– A quoi faut-il donc renoncer pour être heureux ? Y a-t-il un choix stratégique à faire : renoncer à ce qui nous semble moins important pour obtenir l’essentiel. Le renoncement nécessite un effort et il a un prix. Le couple illustre cette situation. Ici, être heureux implique des compromis et des concessions. Ainsi, il faudrait aliéner une part de sa liberté et de ses désirs pour être heureux ? -Faut-il aller jusqu’à renoncer au bonheur pour être heureux ? Et le bonheur est-il le désir ou la satisfaction de son désir ?
– Si le bonheur est le désir, c’est en désirant que l’on est heureux. C’est cependant accepter le manque qui est inscrit dans tout désir. Le bonheur devient possible lorsque l’on lâche prise par rapport à la frustration.
– Or, n’y a-t-il pas une contradiction à penser que la frustration, même dans le désir, est constitutive de notre bonheur ! Ne faut il pas alors renoncer au désir – c’est à dire au manque qui est inscrit dans le désir – pour accéder au bonheur par la plénitude. Être heureux, c’est ne (plus) rien vouloir, c’est-à-dire d’une certaine manière, ne plus avoir de manque. Moins on a de désirs, moins on a de manque, plus on est satisfait, plus on est heureux. Les primitifs par exemple, avaient peu de désirs… Ils étaient trop préoccupés par la satisfaction de leurs besoins. Le besoin est une nécessité vitale à la vie, quasi physiologique, alors que le désir est, selon Maslow, un « besoin » supérieur, qui permet à l’Homme de se réaliser en tant que personne. L’homme qui ne réalise pas ses besoins primaires ne peut accéder au désir ; il doit (sur)vivre avant d’exister. Il semble en être de même pour les sociétés qui ont besoin d’accéder à un niveau supérieur de réalisation de leurs besoins pour accéder au désir et à une représentation plus spirituelle du bonheur.
– Faute de désirs, les primitifs étaient ils heureux ? Les animaux non plus ne désirent pas et ils ne paraissent pas particulièrement heureux. Ils ne sont pas forcément malheureux pour autant (On voit là l’insuffisance de tenter de démontrer une chose par son contraire).
– Pour revenir au bonheur comme renoncement au désir, il y a là un témoignage paradoxal – où l’on accéderait à un état par le fait d’y renoncer – qui ne peut s’accepter qu’en distinguant différents niveaux et formes du bonheur. Mais, renoncer au désir, c’est-à-dire au bonheur, n’est-ce pas renoncer à la vie ? Car dans le même temps, renoncer au désir c’est renoncer à l’espérance. C’est renoncer à changer la (sa) vie ; il y a là, une grande tolérance au monde, sans doute une sorte de sagesse philosophique qui consiste à prendre le monde (soi même) tel qu’il est.
– Mais le bonheur se situe peut être au-delà du désir, dans sa réalisation ? C’est autrement dit, une certaine manière de se réaliser. C’est évidemment une notion subjective et relative : Relative du point de vue sociologique (économique, culturel, historique,…), tant les déterminants environnementaux influencent nos choix. Subjective, car chacun procède à un choix original, en fonction de sa sensibilité, son intelligence, sa liberté. Toutefois, c’est bien la représentation singulière du bonheur qui est relative et subjective, car la question du Bonheur est, elle, fondamentale et a-historique. Les philosophes n’ont-ils pas placé cette question au centre de leurs préoccupations depuis plus de deux mille ans ?
– Peut on ici, essayer de distinguer le bonheur dont on parle. Il y a le grand Bonheur, c’est-à-dire une sorte de bonheur absolu – l’Utopia en quelque sorte, au delà de laquelle il n’y a rien ; une sorte de Nirvana bouddhiste – état de béatitude, que personne ne connaît puisque nous ne l’avons pas vécu, mais que chacun peut se représenter, puisque c’est un rêve. A moins que ce ne soit un mythe ?! Dans la réalisation de ses désirs qui nous fait accéder à l’état de bonheur absolu, de quoi manque t-on ? De rien. Que peut on désirer ? Rien, puisque notre satisfaction est totale. Cela nous incite à inverser la question : Faut-il être heureux pour renoncer ? Peut être peut on introduire ici l’idée que bonheur et désir sont dissociables. En effet, le bonheur dans la réalisation de nos désirs devient jouissance. Mais la jouissance est-elle un état permanent ? De plus, n’y a-t-il pas un amalgame entre plaisir et bonheur ? C’est une approche hédoniste du bonheur.
– Faire coïncider le bonheur et le plaisir est une manipulation mercantile de la société de consommation. La vision socio économique du bonheur est une idée bourgeoise.
– Par ailleurs, il y a le bonheur au quotidien ; celui de vivre et de ressentir, « à chaque instant » que l’on vit, en le traduisant par des attitudes conformes à notre représentation du bonheur, vers soi et vers les autres. Car le bonheur, c’est aussi partager. Non pas partager au sens économique du terme : plus on partage et moins chacun a. Partager au sens d’une mise en commun, où chacun aura plus que ce dont il disposait au départ. Pour Sartre, l’Homme n’a que le désir d’être. Ainsi, l’état de bonheur absolu semble tuer le désir soit, parce que nous renonçons à désirer, soit parce que nous comblons nos désirs. Ce faisant, il tue aussi la vie. Là encore, le bonheur quotidien devient possible parce qu’il est un renoncement au bonheur absolu. Il ne correspond pas à un état mais une dynamique de la vie. C’est à bien à ça que semble nous inviter W. ALLEN quand il dit : « Qu’est-ce que je serais heureux, si j’étais heureux ! ».
– On peut penser à une posture intermédiaire où la recherche du bonheur passerait par un ajustement de ses désirs à ses moyens, de ses envies à ce que l’on peut satisfaire, ce qui permet de ne pas être frustré. Est on malheureux quant on renonce volontairement ?
– On ne renonce jamais uniquement de soi même, les autres interviennent toujours dans nos choix
– C’est une approche économique et rationnelle du bonheur (pratiquement stratégique).
– Renoncer à la matérialité du bonheur, c’est, par analogie, une façon d’accepter la mort et s’affranchir ainsi de l’angoisse qui l’accompagne. C’est cesser d’avoir peur et pouvoir vivre le bonheur au quotidien. La sagesse vient peut être s’insinuer ici ! C’est une inspiration recentrer sur l’existence.
– Pour renoncer il faut avoir goûter une chose. On ne renonce pas à ce que l’on ne connaît pas.

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Café-philo du 28 novembre 2007 au Café des Arts à Poitiers

9 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. L’enfant est-il un citoyen ? [1/9]
  2. Le monde est-il magique ? [6/9] sujet débattu
  3. Y a-t-il des transactions qui échappent au matériel ? [2/9]
  4. Peut-on vivre sans rêves ? [5/9]
  5. Pourquoi se poser des questions ? [2/9]
  6. L’homme est-il un créateur ? [3/9]
  7. Pourquoi se mettre à fumer ? [0/9]
  8. Est-ce que informer, c’est tout dire ? [4/9]

– Comment peut on définir ce qui est magique ? Est-ce dans la compréhension des causes et des conséquences d’un phénomène que la magie disparaît ? Peut on opposer magie à incompréhension ? La foi rend elle les choses magiques ? Quelle est la place de l’imaginaire dans le magique ? Sont-ce les mages qui font de la magie ou les magiciens ? Peut-on expliquer le monde sans lui enlever sa magie ? Même si les scientifiques peuvent parler de la magie du monde ! Plus on grandit et moins le monde nous apparaît comme magique.
– La magie relève de la capacité d’émerveillement que chacun à en soi, notamment lorsque l’on est enfant. Celle-ci s’estompe au fil des ans. Il y aurait alors un lien entre magique et émerveillement, mais également compréhension.
– Pourtant, si ce qui est magique est merveilleux, ce qui est merveilleux ne relève pas forcément du magique. De plus, il est contestable que le magique ne soit que merveilleux, car il existe une magie noire qui rend les évènements tragiques. Ainsi, y a-t-il des souffrances dans le monde pour les individus ou les peuples qui interdisent de penser que le monde est merveilleux.
– Pourquoi associer magique et merveilleux ? Peut être parce que les images véhiculées par le magique sont des histoires de notre enfance. Elles sont alors associées à des représentations merveilleuses (comme le monde merveilleux de Disney !!) et en plus ces histoires finissent bien. Il y a donc une construction infantile de représentations qui nous amènent à relier magique/merveilleux/positif. Le magique est ainsi un reste de notre pensée enfantine et innocente vers le monde : la pensée magique.
– A quoi sert le monde magique ? À rêver d’un autre monde, c’est-à-dire à s’extraire du réel.
– La magie, c’est une sorte de tour de passe-passe, d’illusion qui repose sur une technique qui va servir à duper les gens. Il y a une possible manipulation des gens à leur faire croire que le monde est magique alors que le réel est tragique. Pourtant, si le monde est magique et même si c’est une illusion, c’est une illusion positive qui donne un espoir, une possibilité du bonheur. Lorsque le monde perd son aspect magique, il se désenchante et nous rend triste en nous plaçant face à notre finitude. Mais ce bonheur ne peut-il être trouver dans la rationalité et l’explication du monde, tout autant ?
– Il faut accepter de se laisser séduire par le monde ; de rentrer dans une forme de béatitude pour aller au-delà de la recherche de notre compréhension du monde.
– Le cinéma a pu apparaître comme un phénomène magique dans son avènement : comment peut on mettre quelqu’un dans une boite et le projeter contre une toile ? Mais la compréhension progressive de la technique démystifie le processus, faisant ainsi tomber son caractère magique. Cependant, les images ou les histoires elles mêmes peuvent rendre notre monde magique, en ce qu’elles suscitent pour chacun d’entre nous. C’est la magie du cinéma. Ce qui est magique appartient au domaine du surprenant et du complexe.
– Est magique ce qui relève de la beauté et de l’art, autrement dit ce qui fait appelle à notre subjectivité, par le biais de notre sensibilité. Les choses ne sont pas magiques, en soi, mais c’est notre perception qui les rend telles.
– Le magique renvoie à l’ignorance : ignorance de la nature ou ignorance du divin. Rien n’est magique dans le monde car celui-ci obéit à des lois physiques, chimiques, écologiques, sociales, économiques,… qui relèvent de la rationalité.
– Ce qui est magique, c’est ce qui existe en dehors de ces lois. Le magique, c’est le surnaturel, le supra normal. Le monde serait donc explicable, dans son organisation et dans son fonctionnement, mais non encore expliqué totalement ; c’est cette part d’inexpliqué qui nous apparaît comme magique. Ainsi, le monde n’est il pas magique dans ce qu’il constitue un objet rationnel, mais il conserve de la magie dans ce qu’il a d’encore inexplicable à ce jour. Cette perception est d’ailleurs valable pour chaque individu. Toute connaissance étant relative à chacun d’entre nous, donc évolutive, à une époque donnée et dans un contexte précis, le magique est la part d’irrationalisé du monde pour chacun de nous : ici et maintenant.
– Nous tentons d’expliquer le magique par une approche de l’irrationnel, c’est-à-dire ce qui n’est pas encore expliqué et qui peut renvoyer à une dimension surnaturelle, paranormale, divine… si le magique renvoie à cette dimension, alors on peut admettre que, le monde n’est pas magique, puisqu’il s’explique de jour en jour, en fonction de l’évolution de nos connaissances. Le hasard d’aujourd’hui n’est-il pas le savoir de demain. Les adeptes du zététisme sont les artisans du passage entre le rationnel et l’irrationnel dans ce qu’il a de plus improbable. (Zététique (H BROCK) : art du doute qui s’inspire du scepticisme et qui s’appuie sur une méthode scientifique. Le zététisme consiste en l’étude rationnelle des phénomènes paranormaux, pseudo sciences et autres thérapies étranges ; à l’inverse du pyrrhonisme qui nie la réalité des choses.). On peut cependant objecter de l’inexplicabilité du monde ; autrement dit, de sa non finitude qui nous conduit à une infinie recherche (l’inexplicabilité du monde n’implique d’ailleurs pas qu’il n’y ait pas d’explication mais simplement que nous ne l’avons pas encore atteinte. Les choses existent dans leur cohérence, indépendamment de notre accès à cette cohérence). Le monde gardera en soi une part d’inaccessible, de magique en somme ! On peut également tenter de définir le magique par une approche sensible du monde, pas tant en ce qu’il a de merveilleux en soi, mais dans notre perception émerveillé de ce qu’il est, approche toute subjective (ici, l’approche est une subjectivité subjectivante, – chacun dit ce qu’il ressent du monde – , alors que précédemment nous sommes dans une subjectivité objectivante – chacun dit comment le monde est -). Dire alors que le monde est magique, même pour soi (et d’ailleurs seulement pour soi) revient à un déni des souffrances du monde, ou plus précisément de notre perception de ces souffrances (autisme ?!). Pour autant, il n’y a pas forcément d’antagonisme entre le merveilleux et le rationnel. La découverte de l’explication d’un phénomène et la compréhension qu’elle amène du monde peut être formidable. Le magique associe alors rationalité et merveilleux. Le monde n’est pas magique mais il y a de la magie dans le monde.
– On peut également considéré comme magique ce qui échappe à l’entendement et apparaît comme merveilleux. Si pour certains, l’idée que le monde puisse être expliqué est tragique, car elle ne fait justement plus de place au magique, il paraît tout aussi tragique à d’autres l’inexplicabilité du monde, car il serait alors soumis soit au hasard, soit au divin.
– Le monde ne peut pas être magique car se sont deux entités différentes qui relèvent de deux paradigmes différents. Le monde s’organise et fonctionne à partir de sa matérialité et des représentations de sa matérialité (l’univers, le ciel, la terre, l’Homme, se nourrir, se reproduire, mourir,…). Il s’inscrit dans la nécessité physique de son existence. Il peut certes s’en affranchir, momentanément, par le rêve, la croyance, la foi, la philosophie (! !!), le magique … qui participent de l’espérance humaine,pour s’extirper du tragique de la vie. Mais ces constructions métaphysiques n’impliquent pas qu’elles soient. Ce n’est pas parce que l’on croit que Dieu a créé le monde, que Dieu a créé le monde ! Il ne suffit pas de croire que le monde est magique pour que le monde soit magique. Mais au-delà, comment concevoir que le magique s’organiserait et fonctionnerait selon les mêmes règles que l’humain. Cette entité, si elle existe, s’organise selon ses propres règles, nécessités, possibilités et finalités, s’affranchissant ainsi de celles du monde. Si non ; si elle utilise nos propres lois, elle devient humaine et perd son statut de magique. « Abracadabra » ne peut rien pour nous, pauvres humains. Cela ne renvoie qu’à l’espoir que, dans un autre monde, cela puisse quelque chose que nous ne pouvons pas. Cette une représentation humaine d’un possible sur humain. Si le magique existe, il possède ses règles, ses lois, ses finalités et ses nécessités qui déterminent ses propres modalités de fonctionnement et d’organisation de son monde. Il n’est pas impossible que dans ce monde du magique on rêve que c’est l’humain qui est magique !?

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