Café-philo du 17 octobre 2007 au Café des Arts à Poitiers

24 personnes présentes.

Sujets proposés :

  1. On n’arrête pas le progrès ? [4]
  2. La violence peut-elle être juste ? [11]
  3. En amour doit-on tout accepter, ou seulement une partie ? [6]
  4. Pour philosopher doit-on douter de tout ? [6]
  5. Faut-il agir pour donner du sens au temps ? [12] sujet débattu

– C’est une question qui interroge le sens de la vie. La vie a-t-elle un sens qui lui est donné a priori ? Une sorte de transcendance, ou bien est-ce à chacun de le construire pour sa propre vie.
– Il y a un autre sous-entendu, autour de l’action politique et de sa quête pour transformer le monde.
– Peut-on ne pas agir ? Si on n’agit pas, on s’ennuie.
– On peut agir dans l’immédiateté et agir en anticipant.
– Agit on pour être heureux ou simplement pour agir, c’est-à-dire pour remplir un temps ? Et parce que l’on n’a pas le choix ?
– Ne pas agir, c’est subir la vie et laisser le temps s’écouler sur nous.
– Penser n’est pas agir : on peut rester paralyser par sa pensée et ne rien faire. On peut également agir sans penser.
– Agir c’est réfléchir sur ce que l’on fait. Penser est-il agir ?
– « Les philosophe n’ont fait que penser le monde, ce qui compte, c’est de la transformer. » K MARX – Agir sans penser n’est pas agir, mais réagir. Un peut en effet réagir par instinct ou par réflexe, ce qui renvoie à des comportements animal ou archaïque. L’action relève d’une intention ; son statut est donc soumis à une pensée qui organise l’acte et lui confère une direction.
– Le sens exprime une direction mais également une compréhension du monde.
– Y aurait-il une transcendance qui détermine le sens de nos actes, une sorte de destin qui ferait que nos actes ne consistent qu’à se rapprocher de ce destin mais sans que nous ayons notre propre liberté ?
– Certains disent que si l’Homme n’existait pas, il n’y aurait pas de temps. Je pense que le temps est une donné autonome qui échappe à la présence humaine, comme la terre par exemple !
– De ce point de vue, c’est aussi une donnée objective et universelle qui s’affranchit des contingences humaines. Ainsi en est-il du jour et de la nuit, du cycle des saisons, c’est-à-dire d’un rythme et d’une permanence. Mais le temps est également une donnée subjective, autrement dit l’Homme structure et appréhende le temps de façon relative. Le temps n’est pas le même tout le temps et pour tout le monde. Il est des minutes qui paraissent extrêmement longues, notamment lorsque l’on s’ennuie et où il faut tuer le temps, et des heures trop brèves. Il y a également une dimension culturelle ; par exemple, une nation structure le calendrier en fonction de sa représentation du monde ; le calendrier révolutionnaire, grégorien, lunaire, musulman,… Ces exemples fondent l’idée que sur un temps objectif, il y a la marque, individuelle ou culturelle, c’est-à-dire collective, de l’Homme sur le temps ; action qui est le fruit de ses représentations du monde, de ses croyances, de ses buts. – L’Histoire, la grande comme les petites, semble également être une manifestation de l’impact de l’Homme sur le cours de la vie. C’est bien effectivement l’action humaine qui produit l’histoire et qui oriente dans un sens ou un autre l’avenir de l’Homme. Il y a d’ailleurs, parfois, une action de l’Homme qui tente de relire l’Histoire ou de la déconstruire.
– Le sens qu’on donne au temps est a posteriori : on laisse une marque dans le temps.
– Le sens qu’on donne au temps est a posteriori : on laisse une marque dans le temps.
– On peut agir sur le contenu du temps mais pas sur sa durée. Mais, en fonction de ce contenu, notre perception de la durée du temps fera qu’il sera vécu comme plus ou moins long. Ainsi n’agit on pas sur le temps mais sur notre rapport à celui-ci.
– Le temps est une inexorable platitude qui nous oriente définitivement vers la mort – ou vers l’éternité pour certains.
– On ne donne pas de sens au temps mais à la vie.
– Le temps va toujours dans le même sens, c’est-à-dire qu’il s’écoule inexorablement dans le même sens. Si l’on peut regarder en arrière, on ne peut pas agir sur ce qui s’est passé.
– Y a-t-il une différence de statut entre l’action de l’humanité et l’action individuelle ?
– L’action, quelle qu’elle soit, ne conduit elle pas toujours, dans son intention, à donner du relief au temps ce qui revient à remplir sa vie d’une façon ou d’une autre ! C’est l’importance de l’effet qui serait plus ou moins grand, selon que l’on est plus ou moins influent ou que l’on se trouve dans une zone plus ou moins influente.
– Lorsque l’on travaille à la chaîne, donne t-on du sens à sa vie ? Oui, car le sens que l’on donne à sa vie peut être une conséquence de l’action et pas l’action elle-même. C’est-à-dire le fait de gagner de l’argent et de l’utiliser à quelque chose que l’on souhaite, va contribuer à donner du sens. D’autre part, le sens est peut être de travailler. La nature péjorative du travail effectué intervient secondairement, mais permet quand même de répondre à la question initiale. Car si le travail à la chaîne permet de dire : « ma vie n’a pas de sens », cela sous entend qu’un autre travail pourrait donner du sens et donc qu’agir donne du sens.
– Le sens de la vie n’est pas linéaire mais parfois incohérent
– Le fait d’agir pour donner du sens n’implique pas que l’action posée soit positive ou bénéfique ou cohérente ou encore rationnelle. Il n’y a pas de connotation favorable a priori, justement puisque c’est l’Homme qui agit et que l’Homme, animal doué de raison, n’en est pas moins irraisonnable par moment. Il suffit de faire un retour sur l’Histoire pour en percevoir les effets les plus absurdes.
– L’art n’est il pas une dimension universelle qui peut donner du sens en parlant à chacun dans son émotivité, ses sensations et sa pensée.
– L’art utilise des codes qui ne sont pas accessible à tous. De plus les émotions relèvent le plus souvent de la perception individuelle du monde. Il y a parfois une opacité de l’art qui rend le discours hermétique. Il est donc difficile de croire à l’universalité de l’art mais plutôt à l’organisation d’une stratification sociale et culturelle ; stratification obtenue à partir d’un codage opéré par une intelligentsia, elle même soutenue par une élite financière.
– L’art n’est pas un construit mais une création pure. A partir du moment où cela relève d’une technique, ce n’est plus de l’art.
– Mais l’expression de l’art doit s’appuyer sur des supports et sur une manière de faire. Quand bien même cette manière de procéder n’est-elle pas encodée, elle existe, même dans son ignorance d’exister. Cette « technologie » est indispensable à l’expression artistique et à sa transmission. L’important est que la technique n’étouffe pas l’émotion artistique mais la libère. D’autre part, qui dit que l’art est de l’Art ? Qui dit qu’une création est artistique ou ne l’est pas.
– Agir sur le temps, c’est une façon d’oublier notre mortalité. Le sens de la vie, c’est d’échapper à la mort ; ne pas avoir de réponse à cela, c’est la folie – Certaines idéologies tentent de nous faire oublier notre mortalité par les croyances qu’elles distillent ; christianisme et éternité, politique et postérité, famille et procréation,… ainsi tentent elles de fixer le chemin de chacun dans une destinée qui le surplombe (cf les propos de certains hommes politiques sur leur destin national, s’offrant ainsi une supra légitimité).
– Mais la croyance, n’est-elle pas un espoir d’échapper au néant ? Celui-ci peut venir des idéologies ou être le produit de sa volonté propre. Croire, c’est avoir un espoir vers lequel on se tourne et que l’on cherche à atteindre. C’est un mouvement dans une direction.
– Le sens de l’Histoire, c’est assez facile à trouver, c’est assez évident !!! Mais le sens de la vie de chacun, c’est plus compliqué. Il n’y a pas de sens de l’Histoire, d’ailleurs, celle-ci est jalonnée de sens et de contresens. F FUKUYAMA pensait, après la chute du bloc soviétique, que nous étions à la fin de l’Histoire et que le monde allait (enfin) marcher dans le même sens, vers le progrès technique et politique par l’avènement du libéralisme et de la démocratie. Il n’est pas sur que le socialisme ne soit pas au rendez-vous demain, il n’est pas sur que les alter mondialiste emboîtent le pas d’un nouvel ordre économique mondial, il n’est pas sur que l’écologie ne soit pas à l’avenir, le nouveau paradigme universel, il n’est pas sur que la démocratie soit aujourd’hui aboutie (ce système dont on dit que c’est le meilleur, à défaut d’autre chose !). Il n’y a pas de fin de l’histoire parce qu’il n’y pas de téléologie de l’humanité. Celle-ci reste soumise à l’action de l’Homme et à celle des hommes.
– L’action ne prend-elle du sens pour soi que si elle est reconnue par les autres ?
– « Il faut agir, pour satisfaire ses sens pendant un certain temps »

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